L'agroforesterie et la recherche agronomique
L'agroforesterie est une solution d'avenir pour les cultures, qui ouvre la voie à des innovations agronomiques face aux défis de la sécurité alimentaire et des changements climatiques.

L'agroforesterie et la recherche agronomique

Dans les zones tropicales, l'agroforesterie est une pratique courante pour nombre d'agriculteur·trice·s traditionnel·le·s. Pourtant, sous l’œil de l'agronome moderne qui n'apprend qu'à planter des monocultures, l'agroforesterie est une innovation agronomique qui demande une réflexion soigneuse et peut avoir des effets très positifs sur l'activité paysanne. Le CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) participe à l'exploration de ce champ d’investigation pour les productions arborées agroforestières dans les pays tropicaux.

Le premier intérêt de l'agroforesterie en zone tropicale est la diversification des revenus. En plus de récolter des haricots ou des grains de céréales, les systèmes peuvent produire des fruits, du fourrage, du bois, des produits médicamenteux, des résines, de la gomme arabique ou du beurre de karité, un produit agroforestier qui sert à réaliser des produits cosmétiques. Les gens sont encouragés à développer leurs systèmes agroforestiers ou à entrer en transition dans ce sens grâce à cette diversification des revenus, à laquelle s'ajoute l'amélioration de la qualité des sols et la résilience de ces systèmes face aux aléas climatiques.

Le CIRAD suit les démarches de l'agroécologie dans les pays en développement et en zone tropicale, c'est-à-dire dans le sud de la méditerranée et dans les tropiques, ainsi qu'en Outre-Mer. Cette zone regroupe une cinquantaine de pays différents, en Afrique, en Amérique latine et en Asie du Sud-Est. La spécialité du centre est l'agroforesterie tropicale, avec par exemple l'agriculture multi-étagée ou les arbres dispersés dans les champs de céréales en Afrique. D'autres associations existent, comme les agroforêts, les parcours de pâturages arborés ou les arbres d’ombrage dans les plantations de caféiers et de cacaoyers.

L'agroforesterie participe à remplir un des objectifs du CIRAD, à savoir travailler sur le carbone du sol. Dans le cadre de l'initiative 4 pour 1000, qui fait l'hypothèse qu'une augmentation de 0,4 % par an de tous les sols agricoles ou forestiers de la planète pourrait compenser les émission de gaz à effet de serre dues aux activités humaines, le CIRAD a montré que l'agroforesterie peut contribuer fortement à lutter contre le réchauffement climatique en stockant du carbone dans le sol. Même si les bureaux du centre sont basés à Montpellier, les chercheur·euse·s travaillent en zone tropicale et ont pu vérifier cette hypothèse dans des jachères agroforestières en Afrique et dans des systèmes de ligne d'arbres dans des champs de céréales sous climat méditerranéen.

À la fin du mois de mai 2019, Montpellier accueillera le quatrième congrès mondial d’agroforesterie, organisé tous les cinq ans. Les participant·e·s échangeront sur les enjeux de l’agroforesterie, notamment sur les relations entre sciences, société et politiques publiques. Cette intégration de nouvelles pratiques est à la fois une question sociétale, de politiques publiques et de réformes institutionnelles. La France est le premier pays européen à mettre en place un Plan national de développement de l’agroforesterie.

Article réalisé à partir d'un entretien avec Emmanuel Torquebiau, chercheur au CIRAD Montpellier, expert en écologie tropicale et agroforesterie et président du comité d’organisation international du quatrième congrès mondial d'agroforesterie.

En savoir plus:

Les points forts de l'agroforesterie, sur Sciences en ligne

Quatrième congrès mondial d’agroforesterie : renforcer les relations entre science, société et politiques publiques, actualité du CIRAD

Le site de l'AFAF, Association Français d'Agroforesterie

Image : Parcelle agroforestière pâturée, amandiers en fleurs, Languedoc-Roussillon ©Francois Gardey de Soos