La médecine de demain passera-t-elle par les objets connectés ?
La e-santé s’impose comme un pilier incontournable de la médecine de demain, au travers de l’utilisation d’outils connectés et de nouveaux dispositifs médicaux. Qui sont les acteurs de ce secteur en pleine expansion en France ? Quelles sont les valeurs ajoutées de ces produits ? Pour en savoir plus, nous avons rencontré Christelle Ayache, responsable Santé et Bien-être chez Cap Digital, le pôle de compétitivité et de transformation numérique.

La médecine de demain passera-t-elle par les objets connectés ?

A la croisée entre les progrès récents de la technologie et de l’évolution vers une médecine plus préventive, la e-santé est devenue depuis quelques années un élément indispensable des nouvelles pratiques qui visent à préserver notre capital santé.

Il s’agit d’un marché en véritable « boom » financier : les dépenses de santé en France dépassent les 243 milliards d’euros et on estime que la part consacrée à la e-santé progressera de 4 à 7% d’ici 2017. Lors de la dernière édition du Consumer Electronics Show de Las Vegas, la France était la 2e nation la plus représentée, démontrant l’intérêt et l’innovation dont font aujourd’hui preuve les porteurs de projets (laboratoires, industries pharmaceutiques, entreprises…). Ils sont de plus en plus nombreux à créer leur start-up afin de développer un produit ou un service qui soit à la fois innovant, utile et économiquement viable. Une tâche qui s’avère parfois difficile, d’où la nécessité d’être soutenu dans ces démarches. Et c’est une des missions dans laquelle s’investit Christelle Ayache, responsable Santé et Bien-être au sein du pôle de compétitivité Cap Digital.

« La e-santé consiste à utiliser le numérique pour traiter les problèmes de santé », explique-t-elle de façon concise. Des balances connectées aux tensiomètres, en passant par les lecteurs intelligents, la e-santé regroupe des dispositifs, des applications web et mobile (on parle d’ailleurs désormais de m-Santé) ou encore des nouveaux prestataires de services. Des modes de consommation innovants en découlent, comme le « quantified self » qui permet à l’utilisateur de mesurer lui-même différentes variables de son corps ou de ses activités. On retrouve ainsi dans cette catégorie les innombrables bracelets capables de suivre en temps réel notre fréquence cardiaque, très prisés des sportifs, ou des capteurs qui peuvent analyser et améliorer notre sommeil à l’instar du capteur Aura de la société Withings.

Si certains de ces objets relèvent plus du bien-être que de la santé à proprement parler, d’autres en revanche vont beaucoup plus loin : StreetLab (en partenariat avec l’Institut de la Vision) développe par exemple un dispositif qui guide les déficients visuels dans la rue, tandis que la société Vizua 3D, dont le laboratoire de recherche est situé au sein de l’université Paris-Descartes, s’investit dans l’impression en trois dimensions.

Tant de nouveaux supports qui peuvent servir à la communication, la formation ou bien la rééducation : un incroyable éventail de possibilités s’offre aux professionnels de santé. Au risque de voir disparaître les relations entre patients et médecins ? Christelle Ayache explique : « S’il est vrai que l’on se dirige vers une nouvelle forme de santé, ces outils restent entièrement complémentaires à ce qui se fait déjà aujourd’hui. Ce sont des outils qui aident les professionnels, et qui ne sont pas destinés à les remplacer. ». Il faut donc bien comprendre que certains dispositifs d’e-santé doivent évidemment rester sous contrôle médical, d’autant plus qu’un projet est toujours pensé pour une catégorie particulière d’individus et donc pas forcément adapté à tous.

Et si les différents acteurs, porteurs de projets comme décisionnaires, tentent d’exploiter les opportunités offertes par les objets connectés, la question de la collecte et du traitement des données reste en suspens. Jusqu’à présent, ils sont soumis à une réglementation par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), qui décide d’en autoriser ou non la commercialisation, en fonction de la gestion qui est faite des informations acquises. L’exploitation de ces données publiques s’inscrit d’une certaine façon dans la logique du big data, et toute mesure ou trace réalisée par l’un de ces outils pourrait être conservée. Mais comment s’assurer que la confidentialité soit garantie ? « Il faut bien sûr pouvoir s’assurer de la protection des données collectées. Cela reste une question importante sur laquelle nous devons travailler » commente Christelle Ayache.

Une réelle problématique qui impose de sérieuses réflexions. La mise à disposition de ces informations au public (ou « open data ») de ces données pourrait en effet avoir plusieurs retombées intéressantes. On pourrait ainsi envisager de pouvoir renforcer la surveillance épidémiologique de la population, améliorer la prise en charge des patients ou bien mieux évaluer l’efficacité de certains traitements. Et pourquoi pas dans une certaine mesure, fidéliser les utilisateurs et participer à la création d’un véritable écosystème autour de la e-santé ? Mais ceci nécessiterait probablement d’avoir recours à d’importants moyens techniques et informatiques... en plus des évidentes interrogations liées à l’éthique.

Alors au final, vers où se dirige la médecine de demain ? S’il est certain qu’elle intégrera de plus en plus les objets connectés, ses enjeux incluront inévitablement la recherche perpétuelle d’innovation et de business models viables, en plus des questions liées à l’exploitation des données.

En savoir plus:

Cap Digital, le pôle de compétitivité et de transformation numérique : http://www.capdigital.com/

L'agence des systèmes d'information partagés de santé : http://esante.gouv.fr/

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